La règlementation française du contrôle des investissements étrangers
Enjeux
- Principe de liberté des relations financières entre la France et l’étranger (art. L151-1 Code monétaire et financier)
- Enjeu = Mettre en place des mesures limitant certains effets du marché et de la concurrence dans un contexte mondialisé
- On parle de « protectionnisme » /« souveraineté » / ou de « patriotisme » économique
- Nécessité pour certaines entreprises en période de pandémie. L’équilibre entre ouverture et fermeture des échanges économiques devient une question centrale de la gestion de crise.
Un peu d'histoire
- Décret n°1739 du 30 décembre 2005 dit « décret Villepin »
- Décret n°2014-479 du 14 mai 2014 dit « décret Montebourg » (secteur règlementé, énergie, transports, communication)
- Décret n°2018-1057 du 29 novembre 2018 et n°2019-1590 du 31 décembre 2019 pour alignement avec le règlement n°2019/452 du 19 mars 2019
- Arrêté du 10 septembre 2021 – Ajout des biotechnologies dans le contexte de crise sanitaire et abaissement des seuils de déclenchement de la procédure d’autorisation des IE pour les investisseurs de pays tiers
- Arrêté du 10 septembre 2021 – Ajout des technologies intervenant dans la production d’énergie renouvelable.
- Décret n°2002-892 du 22 juillet 2020, décret n°2020-1729 du 28 décembre 2020 puis décret n°2021-1758 du 22 décembre 2021 – Renforcement provisoire de la réglementation des IE dans les sociétés françaises cotées
Règlementation française des investissements étrangers
REGIME DECLARATIF A POSTERIORI / Repose sur la notion de « non-résident »
- Focus sur le lieu du principal centre d’intérêt (rattachement à la notion de résidence fiscale)
- Enjeu = Permettre l’établissement de la balance des paiements et la position extérieure de la France
VS
REGIME D’AUTORISATION A PRIORI / Repose sur la notion d’ « investisseur étranger »
- Focus sur la nationalité
- Enjeu = Contrôler les secteurs clés de l’économie
I) Investissements étrangers soumis au régime déclaratif
Obligation de déclaration statistique à la banque de France
Déclarations mensuelles des investissements réalisés par certains agents économiques
- Etablissements de crédit et de financement pour les règlements entre résidents et non-résidents effectués en France > 12 500 €
- Entreprises ou groupes d’entreprises pour les opérations avec l’étranger ou France avec des non-résidents pour au moins une rubrique de services ou de revenus de la balance des paiements, quelles que soient leur nature ou leurs modalités > 30 millions € sur une année civile
- Opérations à l’étranger > 1 million € (notamment à partir de comptes ouverts à l’étranger, ou par compensation de créances et de dettes) réalisés directement par des résidents
- Encours de biens et créances à l’étranger ou des dettes envers l’étranger > 10 millions € des résidents
Déclarations ponctuelles pour certains investissements > 15 millions € sous 20 jours ouvrables à compter de la date de versement de l’investissement
- Investissements directs étrangers en France et leur liquidation Acquisitions ou cessions d’entreprises non-résidentes par des résidents
- Acquisitions ou cessions de biens immobiliers à l’étranger par des résidents et en France par des non-résidents.
Investissement direct étranger
- Opérations par lesquelles des non-résidents ou des résidents acquièrent au moins 10 % du capital ou des droits de vote, OU franchissent le seuil de 10 % d’une entreprise résidente ou non résidente respectivement
- Toutes les opérations entre entreprises apparentées, de quelque nature qu’elles soient, telles que prêts, emprunts ou dépôts, ainsi que les investissements immobiliers.
RESIDENTS
- Personnes physiques ayant leur principal centre d’intérêt en France
- Fonctionnaires et autres agents publics français en poste à l’étranger dès leur prise de fonctions
- Personnes morales françaises ou étrangères pour leurs établissements en France
NON-RESIDENTS
- Personnes physiques ayant leur principal centre d’intérêt à l’étranger
- Fonctionnaires et autres agents publics étrangers en poste en France dès leur prise de fonctions
- Personnes morales françaises ou étrangères pour leurs établissements à l’étranger
II) Investissements étrangers soumis au régime d'autorisation
La règlementation française du contrôle des investissements étrangers
-
Investisseurs visés
Personne physique de nationalité étrangère
Personne physique de nationalité française n’ayant pas son domicile fiscal en France
Entité de droit étranger
Entité de droit français contrôlée par une ou plusieurs personnes ou entités visées ci-dessus
-
Investissements visés
Acquisition du contrôle d'une entité de droit français
Acquisition de tout ou partie d'une branche d'activité d'une entité de droit français
Franchissement direct ou indirect, seul ou de concert, du seuil de 25 % de détention des droits de vote d'une entité de droit français
Pas de notion de montant d’investissement contrairement au régime déclaratif -
Secteurs visés
Activités de nature à porter atteinte aux intérêts de la défense nationale, participant à l'exercice de l'autorité publique ou de nature à porter atteinte à l'ordre public et à la sécurité
publique
Investissements visés
EXCEPTIONS au franchissement direct ou indirect, seul ou de concert, du seuil de 25 % de détention des droits de vote d’une entité de droit français:
- Investisseurs personnes physiques possédant la nationalité d’un Etat membre de l’Union européenne ou d’un Etat partie à l’accord sur l’Espace économique européen ayant conclu une convention d’assistance administrative avec la France en vue de lutter contre la fraude et l’évasion fiscale et domiciliée dans l’un de ces Etats
- Entités dont l’ensemble des membres de la chaîne de contrôle relèvent du droit de l’un de ces mêmes Etats ou en possèdent la nationalité et y sont domiciliés,
- EXCEPTION COVID : Seuil temporairement abaissé à 10% pour toute prise de participation par un investisseur étranger hors UE et UEE dans une société française cotée intervenant dans un secteur sensible jusqu’au 31.12.2022
Secteurs d’activités visés
- Armes, munitions, poudres et substances explosives
- Biens et technologies à double usage
- Jeux d’argent, à l’exception des casinos
- Réseaux et des services de communications électroniques
- Activités exercées par les entités dépositaires de secret de la défense nationale
- Utilisation illicite d’agents pathogènes ou toxiques
- Missions de la police nationale, gendarmerie nationale, sécurité civile, douane et sociétés agréées de sécurité privée
- Sécurité des systèmes d’information
- Traitement, de transmission ou de stockage de données
- Etablissement, d’une installation ou d’un ouvrage d’importance vitale
- Activités directe ou sous-traitance au profit du ministère de la défense
- Approvisionnement en énergie et en eau
- Protection de la santé publique
- Activités relatives aux moyens et prestations de cryptologie
- Recherche et développement portant sur des technologies critiques
- Production, la transformation ou la distribution de produits agricoles
- Détection à distance des conversations ou la captation de données informatiques
- Exploitation des réseaux et des services de transport
- Edition, l’impression ou la distribution des publications de presse d’information politique et générale
- Evaluation et certification de la sécurité offerte par les produits et les systèmes des technologies de l’information
- Opérations spatiales
Procédure d'autorisation des investissements étrangers
Sanctions communes aux investissements étrangers soumis à déclaration et à autorisation
Sanctions pénales
- Peine d’emprisonnement de 5 ans
- Confiscation
- Amende comprise entre le montant de l’infraction et le double du montant de l’infraction
- Peines additionnelles (interdiction d’exercice d’une activité commerciale, fonction publique…Article 131-39 Code Pénal)
Sanctions additionnelles pour les investissements soumis à autorisation
Sanction civile
Nullité absolue des conventions ou engagements qui réalisent directement ou indirectement l’investissement étranger
Sanction pécuniaire
Somme la plus élevée des trois:
- Double du montant de l’investissement irrégulier
- 10% du CA annuel HT de l’entreprise
- 5 Mio. € (pers. morales) / 1 Mio. € (pers. physiques)
Pouvoir d’injonction du ministre de l’économie
2 situations:
- Investissements réalisés sans autorisation
- Méconnaissance de l’autorisation d’investissement
Possibilité d’assortir l’injonction d’une astreinte de max 50.000 €/jour ou de mesures conservatoires (ex: suspension de droits de vote, dividendes, désignation mandataire….)